Regards de Séverin Wunderman sur Jean Cocteau
Le musée « Jean Cocteau collection Séverin Wunderman » forme un ensemble désormais indissociable en unissant deux noms, celui de l’artiste et celui de son collectionneur. Le musée construit autour de cette collection est devenu l’emblème du passage de l’artiste à Menton, mais aussi un signe fort posé par l’architecte Rudy Ricciotti dans son paysage. Pour ce nouvel accrochage, l’accent est placé sur ce lien tissé entre les trois créateurs, trois points posés en signe de stabilité et d’équilibre parfait.
« L’artiste et le collectionneur », avec « Regards de Séverin Wunderman sur Jean Cocteau » en sous-titre : car toute collection repose sur des choix personnels. Pendant cinq mois (du 28/11/2015 au 03/04/2016), Jean Cocteau et Séverin Wunderman seront accompagnés par l’architecte du lieu, Rudy Ricciotti, à qui sera consacrée une exposition temporaire « Poésie d’architecture par Rudy Ricciotti ». L’exposition « Ricciotti architecte », conçue par la Cité de l’architecture et du patrimoine, sous le commissariat de Francis Rambert, directeur de l’Institut français d’architecture, vient apporter l’ouverture contemporaine d’un architecte - poète qui écrit :
« Être dans la morale du matériau et refuser le moralisme, être dans la mémoire du matériau et refuser la leçon, être dans la violence du matériau mais en révéler la tendresse… ».
Dans ce parcours, contenu et contenant se donnent la réplique, entre présence et absence des interlocuteurs, communication visuelle où l’histoire se déroule en commençant par l’artiste et son œuvre.
Cocteau, entre écriture et ligne claire de dessin ou écriture de lumière pour le cinéma, nous convie éternellement à l’accompagner dans sa quête de poésie. Séverin Wunderman, grâce à son admiration sans borne pour l’artiste, nous permet de contempler Jean Cocteau et son temps. Rudy Ricciotti a noué le dernier lien et déroule dans l’espace le fil de leur conversation. Il a fait de cette demeure du poète un lieu habité ou hanté, ainsi que Jean Cocteau aimait à le nommer.
Le temps d’une année, le Bastion, musée historique, retrouve l’accrochage d’origine conçu par Jean Cocteau.
« Ne hante pas sa maison qui veut. C’est affaire de tempête et d’incendie. J’ai connu des périodes où la mienne ne me voulait pas. Elle me refusait son aide. Les murs ne s’imprégnaient de rien. Il leur manquait les grandes ombres du feu, les moires de l’eau. Plus ma maison se vidait de moi, plus je me vidais d’elle. Ce manque d’échange faisait une platitude. Ni l’un ni l’autre n’étions plus capables de piège. Point de piège, point de gibier. C’est vivre bredouille. Mes amis le ressentaient. Et ils reculaient comme les murs. Il me fallait attendre que les effluves revinssent, se contrariassent, formassent ce mélange explosif par quoi nos demeurent flambent. Car elles nous imitent et ne nous rendent que ce que nous leur donnons. Mais cet écho parle et oblige au dialogue. »
Jean Cocteau, « Des maisons hantées », La difficulté d’être,
Éd. du Rocher, 1957