Après l’inondation de ses réserves, le musée Jean-Cocteau | Collection Séverin- Wunderman panse ses plaies et s’attaque à la restauration des œuvres endommagées par l’eau de mer.
À 2h30 du matin, ce mardi 30 octobre, Françoise Léonelli n’en croit pas ses yeux. La conservatrice du musée Jean-Cocteau | Collection Séverin-Wunderman découvre des locaux dévastés.
Le seul mot qui lui vient alors à l’esprit résume aussi clairement que possible la situation : cataclysme.
Au cœur de la nuit, en l’espace de quelques minutes, la tempête Adrian a durement frappé Menton et son musée. Une succession de vagues allant jusqu’à 7 mètres de hauteur a inondé le sous-sol de ce bâtiment réalisé par l’architecte Rudy Ricciotti… Et mis en péril les 2 000 œuvres qui y sont entreposées. « La mer est passée par-dessus le Bastion et la route ; elle a ensuite envahi la coursive qui mène à nos bureaux… » Face à l’exceptionnelle masse d’eau, les pompes de relevage ont rapidement été saturées, une des baies vitrées a explosé, laissant les flots s’engouffrer dans les sous-sols du musée. « À mon arrivée, il y avait près d’un mètre soixante d’eau sur la totalité des 1 000 m2 du cabinet d’art graphique et de la grande réserve », témoigne la conservatrice.
Les sapeurs-pompiers étaient déjà à pied d’œuvre pour évacuer l’eau et sauver les collections conservées sur ce niveau.
Une véritable chaîne humaine
Meubles éventrés, documents détrempés, sols boueux…
Après une demi-journée de pompage au rythme de 120 m3 par heure, c’est un paysage de désolation que découvre l’équipe du musée. Sa crainte : la perte totale des collections. Agents de la Ville, collègues des différents musées des Alpes-Maritimes, sapeurs-pompiers du groupement territorial Nice-Montagne, de Menton et de la section opérationnelle nautique du SDIS 06 se mobilisent. En urgence !
Commence alors une véritable chaîne humaine pour extraire l’intégralité des œuvres, les mettre à l’abri au palais de l’Europe et, pour certaines, les sécher. Aujourd’hui, toutes les opérations de transfert sont terminées.
Avenue Boyer, la noria de camions a cédé la place aux va-et-vient des experts et des restaurateurs. Après avoir désencadré et mis les œuvres à plat sur des buvards, l’heure est venue de les inventorier, d’évaluer leur état et de prendre la mesure des restaurations à entreprendre. « Nous ne pouvons pas encore estimer l’ampleur des dégâts », souligne Françoise Léonelli dont la priorité absolue est, avant toute chose, de mener différentes actions de sauvegarde et de lutte contre les dégradations liées à l’humidité des documents.
Des restaurateurs spécialisés
« Nos principaux ennemis sont désormais les risques de moisissures et de prolifération des bactéries », confirme-t-elle.
Avec le renfort de restaurateurs spécialisés dans les domaines de la tapisserie, de la photographie, du papier ou encore de la peinture, ainsi que de représentants du Centre de recherche et de restauration des musées de France (C2MRF), l’équipe du musée s’est donc attelée à l’organisation de ces actes presque chirurgicaux.
D’ores et déjà, la conservatrice envisage d’envoyer une quarantaine de tableaux à Marseille, plus précisément au Centre interdisciplinaire de conservation et de restauration du patrimoine (CICRP) : « L’hôpital des œuvres d’art ! »
D’autres éléments des collections conservées au musée devraient enfin rejoindre divers ateliers spécialisés afin d’y être soignés.
Rénovation des locaux
En attendant la fin de ces campagnes de restauration, le musée Jean-Cocteau | Collection Séverin-Wunderman demeure fermé au public. Toutes les expositions programmées ont été annulées.
Car, derrière le sauvetage des œuvres, se pose également la question de la réfection des locaux eux-mêmes.
Le sous-sol du bâtiment n’est plus apte à accueillir aussi bien les tableaux, les affiches, les écrits que le personnel. « Dans les prochaines semaines, d’importants travaux de rénovation des sols, des murs, des baies vitrées, des circuits électriques et du système de ventilation seront nécessairement menés pour nous permettre de réintégrer les lieux », précise Françoise Léonelli avant d’évoquer plusieurs mois de fermeture.